Nicolas Dupont-Aignan, modéré, vraiment ?
Nicolas Dupont-Aignan se proclamant modéré, candidat pour la seconde fois aux présidentielles, à la tête du parti Debout la France, contribue à alimenter les discours réactionnaires qui constellent la vie politique en général et trouve dans la campagne électorale une bonne occasion de faire entendre sa chapelle politique à un plus large auditoire éventuellement susceptible d’y adhérer.
NDA pour les initiés, maire de Yerres au Nord-Est de l’Essonne depuis 1995 et député depuis 1997, a formé en 1999 un groupe politique au sein du RPR, Debout la République, à l’occasion des élections européennes puis rejoindra quelques mois plus tard le RPF fondé par Charles Pasqua et Philippe de Villiers. Qu’il quittera un an après pour retourner au sein du RPR : Libération du 6 avril 2000. C’est en 2007 qu’il part de l’UMP pour fonder son propre parti, Debout la République (qui deviendra Debout la France en 2014 à l’occasion des Européennes), estimant accomplir son devoir vis-à-vis des Français ayant voté non au Référendum de 2005 sur la Constitution Européenne : 20 Minutes du 13 janvier 2007. Cette même année il avait candidaté à la présidence de l’UMP qui fut remportée par Nicolas Sarkozy. Debout la République ne sera pas présent aux élections présidentielles, Nicolas Dupont-Aignan n’ayant pas obtenu les 500 signatures. En 2012, cette fois candidat, il obtiendra 1,79% des voix au premier tour et plus de 1% aux législatives.
En septembre 2016, il tient meeting à Aubervilliers pour sa rentrée politique. Lors des régionales de 2015, il avait déjà pu s’introduire en Seine-Saint Denis grâce à son chef de file départemental Eugène Henri-Moré, ancien membre du Collège exécutif du PCF, ancien adjoint (apparenté PCF) au Maire de la Courneuve de 2001 à 2014 et proche de Claude Bébéar. En introduction de son discours du 4 septembre 2016 auprès de 600 personnes environ Nicolas Dupont-Aignan campe les bases et le registre sémantique de son racolage idéologique et de ses ambitions : " Mes chers amis, avant de vous parler de l’année de combat et d’espérance qui commence, je tenais à vous remercier d’être là, aussi nombreux, ce dimanche à Aubervilliers. Votre présence démontre que Debout la France est désormais une force politique qui compte. Nous avons été la surprise des européennes et des régionales. Nous serons la grande surprise de la présidentielle. Merci à vous militants fidèles, merci à vous qui nous rejoignez plus nombreux chaque jour. Merci aux nombreux élus de terrain qui par leur signature me permettront d’être candidat. Vous êtes les héros de la renaissance française. Mes amis, malgré la joie qui est la mienne de vous revoir, je ne peux m’empêcher de vous dire que l’heure est grave. Oui, l’heure est grave pour la France. Le pronostic vital de notre pays est aujourd’hui engagé. Si nous ne faisons rien nous assisterons impuissants à la disparition de notre cher et beau pays, la France. Des valeurs qu’elle incarne, de sa civilisation. Je ne peux l’accepter. Vous ne l’acceptez pas non plus. Nous n’avons qu’un devoir, qu’une mission : sauver notre nation, lui redonner son indépendance, sa force, son éclat, sa fierté. Voilà notre défi. Et ce défi, n’ayons pas peur de le relever. Nous allons le relever ensemble. La reconquête commence ici à Aubervilliers ! Avec vous ! "
Le reste suivra, extraits choisis :
- "Je suis maire de banlieue et je sais combien, derrière les clichés, celles et ceux qui vivent dans ces villes abandonnées méritent mieux. Il y a ici comme ailleurs toute une jeunesse, d’origine souvent diverse, qui a envie de travailler, qui veut réussir, qui aime la France et qui souffre d’être enfermée dans ces nouveaux ghettos. Cette jeunesse en a assez d’être « amalgamée » à la racaille devenue maître de la rue, cette nouvelle jungle". À noter que N. Dupont-Aignan est maire réélu à 75% d’une ville de vieux de 29000 habitants dans l’Essonne ayant majoritairement voté Hollande en 2012, majoritairement résidentielle, propriétaire, d’un niveau de vie confortable (revenu net imposable moyen : 28 807 euros) où l’on paye 1300 euros de taxe d’habitation pour un 46 m2, qui ne respecte pas les quotas de 25% obligatoires de logements sociaux, où les postes des effectifs municipaux sont supprimés, par contre abondamment dotée en caméras de surveillance et en subsides parlementaires.
- "Car ces dernières années n’ont pas été des années comme les autres. La France n’est plus seulement menacée, elle est attaquée. La barbarie islamiste a assassiné 230 Français. Chacun d’eux incarne la Nation tout entière. Nous ne les oublierons jamais. La France est meurtrie et le système continue ses petits jeux politiciens dérisoires. Alors ce dimanche, je veux dire solennellement à tous les Français qui savent maintenant que la France peut mourir, qu’il y a urgence à se réveiller.
Oui il est temps :
— de nettoyer la politique,
— de balayer cette dictature molle et médiocre qui mine notre démocratie,
— de redonner vie à la souveraineté populaire,
— de remettre de l’ordre,
— de récompenser le travail,
— de se projeter dans l’avenir,
— de parler au monde, en un mot de reprendre comme « Français libres » notre destin en main."
- " Car oui, le chaos dans lequel se trouve notre pays est le résultat de trente années de choix politiques suicidaires ! Des choix pris par la plupart de ceux qui aujourd’hui osent se présenter à nouveau au suffrage des Français ! Leur responsabilité, droite et gauche confondue, est immense. Ne l’oubliez jamais."
- "Immense trahison lorsque, après le référendum de 2005, les parlementaires de droite et de gauche ont violé le peuple français en ratifiant le traité de Lisbonne."
- "Ils prétendent réduire l’immigration ; ils mentent car ils ne veulent pas rétablir nos frontières nationales ! Moi... je les rétablirai ! Ils prétendent renforcer la sécurité des Français ; ils mentent car ils proposent de supprimer des centaines de milliers de fonctionnaires. Moi je recruterai 100 000 policiers, gendarmes, militaires, douaniers, agents du renseignement (par redéploiement bien évidemment). Ils prétendent combattre l’état islamique tout en tolérant le double jeu de la Turquie et de certains pays du Golfe."
- "Mes chers amis, la date de notre rassemblement n’est pas anodine.
- 4 septembre 1870 : le peuple proclame la République Française pour entrer en résistance contre l’invasion prussienne et consacrer le règne de la liberté sur notre sol.
- 4 septembre 1958, le Général De Gaulle prononce un magnifique discours place de la République. Ses propos n’ont pas pris une ride : « au milieu de la tourmente nationale et de la guerre étrangère, apparut la République. Elle était la souveraineté du peuple, l’appel de la liberté, l’espérance de la justice. Elle devait rester cela à travers les péripéties agitées de son histoire. Aujourd’hui, autant que jamais, nous voulons qu’elle le demeure
- "L’assimilation doit être désirée, d’où la nécessité d’un grand projet national qui offre à chacun de nos concitoyens la dignité et l’espérance. C’est cette espérance de la justice qu’exprimait le Général de Gaulle place de la République, le 4 septembre 1958." [...] "Outre le rétablissement de l’ordre public, il est urgent de redresser la France au plan économique et social pour réconcilier les Français [...] :
- "Division par deux de l’impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis sur le sol national"
- [...]
- Voilà pourquoi je propose trois mesures fortes :
1 - Toute aide sociale et notamment le RSA doit donner lieu à une contrepartie sous la forme d’un travail d’intérêt général au service de la collectivité. De leur côté, les étrangers ne pourront bénéficier des aides sociales qu’après 5 ans de cotisations à notre État providence. On en finira ainsi avec un appel d’air migratoire qui n’est plus finançable.
2 - Revalorisation de 10% des salaires nets par une diminution d’un tiers des charges salariales qui figurent sur la feuille de paye. Ces 40 milliards d’allègement de charges seront financés par la lutte contre la grande fraude fiscale (TVA) et par la réduction des abus de l’assistanat.
3 -Augmentation des pensions pour près de la moitié de nos retraites à hauteur de 100 euros par mois, financée par la suppression de la contribution nette de la France à l’Union européenne (8 milliards).
- "Chaque Français doit pouvoir s’il en a la volonté et le courage :
— Participer à la gestion de son entreprise grâce à l’actionnariat salarié ;
— Accéder à la propriété ;
— Bénéficier d’une formation professionnelle surtout s’il est sorti tôt du système scolaire ;
— Construire sa retraite avec un dispositif à points ;"
Ici l’intégralité du kit langagier du parfait homme d’extrême-droite "ni extrêmes, ni système", souverainiste, au discours plutôt radical et agressif que modéré : http://www.gaullisme.fr/discours_nicolas_dupont-aignan_aubervilliers.pdf. On peut s’entraîner à le prononcer devant sa glace ou devant un parterre d’amis chevènementistes, nationalistes, racistes, capitalistes, gaullistes, identitaires, déclinistes pour distraire ses soirées. "Chers amis" peut être remplacé par "Chers patriotes". Puis s’en aller manifester devant TF1 au nom de la démocratie.
PS : en 2013, N. Dupont-Aignan soutiendra Robert Ménard aux municipales de Béziers aux côtés du FN. En 2015 Debout la France fera liste commune avec la Ligue du Sud lors des élections départementales dans le Vaucluse et les Alpes de Hautes Provence. Côté déclaration du patrimoine, il est indiqué le plus riche des candidats par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique : 2.329.000 euros dont 6 appartements à Paris et une maison en Essonne ( dont 1.300.000 euros pour un 105 m2 et 255.000 euros pour sa maison).
L’ensemble des candidats à l’élection présidentielle 2017 "bénéficie" d’un portrait subjectif. Il s’agit de présenter les candidats tels qu’on les voit ou qu’on se les imagine. Il n’est pas dit qu’il y ait que du faux dans ces portraits.
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