Littérature

"Il faut prendre mon bouquin de la première à la dernière page."

Interview de Michel Grosgurin
mardi 31 janvier 2012 à 08:26, par Mercure Galant

Michel Grosgurin vient de faire paraître son deuxième recueil de nouvelles, intitulé "Beurre noir". Douze histoires bien plus consistantes que le titre ne pourrait le laisser supposer. Heureuses retrouvailles et fructueuse discussion avec l’auteur, à la librairie la Poterne, un jour de dédicace...

"Il faut prendre mon bouquin de la première à la dernière page."

L’Agitateur : « Beurre noir » est votre deuxième recueil de nouvelles. Quand est donc apparue chez vous l’envie d’écrire ?

Michel Grosgurin : J’ai toujours écrit. D’abord pour des raisons professionnelles, mais également pour moi. J’ai écrit par exemple un recueil de poèmes pour enfants, et puis des nouvelles, depuis toujours. J’en ai encore beaucoup en stock qui ne sont pas encore publiées ! Je m’étais toujours dit qu’il faudrait qu’un jour je m’y mette. C’est ce que j’ai décidé de faire une fois arrivé à la retraite. Je consacre maintenant beaucoup de temps à l’écriture et c’est pourquoi les parutions se succèdent assez vite malgré tout.

L’Agitateur : Pourquoi avoir choisi d’écrire des nouvelles ?

Michel Grosgurin :Je suis un grand amateur de nouvelles et je trouve que c’est un genre très négligé dans la littérature française au profit du roman, dont on ne sait plus aujourd’hui exactement ce qu’il recouvre, entre l’autofiction, la biographie, la fiction… Moi j’écris des fictions. J’essaie de créer des personnages, de les faire vivre avec leur propre problématique et leur propre logique. Je peux écrire « je » mais « je » est un autre et ce n’est pas mon problème. Je suis distancié par rapport à ça. Je ne m’embarrasse pas non plus de questions de longueurs. Certaines des nouvelles sont longues, d’autres courtes. J’ai besoin d’un espace pour les faire vivre. Je veux que les personnages aient de la chair et du sang, une psychologie et je souhaite installer une entrée explicative dans leur destin. Il faut prendre mon bouquin de la première à la dernière page. Il y a une logique, un fonctionnement interne au recueil qui ne se réduit pas à une collation d’histoires, comme c’était souvent le cas au XIXème siècle. C’est pourquoi le titre n’est pas le titre éponyme d’une nouvelle mais un titre à part entière.

L’Agitateur :Comment choisissez-vous les nouvelles qui composent vos recueils ? Puisez-vous dans ce que vous avez déjà écrit précédemment ?

Dans Aigre-doux , j’ai travaillé sur cinq thèmes : la mort, les affects, le rapport de l’histoire individuelle dans l’Histoire avec un grand H, l’écriture et la culpabilité. J’ai fait en sorte que chacune de ces nouvelles reprenne ces thèmes en mode mineur et en mode majeur. J’ai voulu en fait que le recueil soit plus proche du roman avec une première nouvelle renvoyant par exemple à la dernière. On pourrait y voir des chapitres bien qu’il soit constitué d’histoires indépendantes. Quand le projet d’Aigre-doux s’est mis en place, j’ai trouvé que certaines des nouvelles qui venaient sous la plume étaient trop dures et je les ai mises de côté...

L’Agitateur : Dans ce nouveau recueil, c’est donc la même approche qui vous a guidé ?

Michel Grosgurin : Oui, ces cinq thèmes sont des thèmes universels. Personne bien sûr n’échappe à la mort, personne n’échappe à la domination de ses affects, personne n’échappe à l’Histoire ni à la culpabilité à un moment ou à un autre de sa vie... et aucun écrivain n’échappe à l’écriture !(rires) Mais j’ai voulu aussi ajouter d’autres thèmes. Le thème de l’éducation , celui du racisme, de la révolte et de l’indignation par rapport au monde et à la façon dont il est en train d’évoluer. Le recueil s’appelle « Beurre noir » car c’est effectivement beaucoup plus noir.

L’Agitateur : On retrouve bien là votre goût de jouer avec les mots…

Michel Grosgurin : Oui, en fait on est toujours dans la cuisine. Je fais souvent cette comparaison. La littérature c’est une cuisine dans laquelle il faut de bons ingrédients, un bon assaisonnement, des couleurs, des senteurs, des saveurs. Il faut la partager avec d’autres et quand elle est sur une assiette, c’est aussi un décor. Sans tous ces ingrédients, on rate pas mal de choses…

L’Agitateur : L’écriture est-elle toujours un plaisir ou parfois une contrainte ? Comment procédez-vous pour écrire vos histoires ?

Michel Grosgurin : Ce n’est jamais une contrainte ! Je suis arrivé à un moment de ma vie où j’espère avoir le moins de contraintes possibles ! Pour moi, écrire une histoire, cela vient assez vite. Le problème est toujours de trouver l’élément déclencheur. Je passe ensuite directement à la fin et je note le canevas sur une demi-feuille de papier. Ensuite l’histoire mûrit toute seule... Si elle revient trop souvent dans ma tête ou dans mes rêves c’est qu’elle veut pousser. À ce moment là, je m’y mets et j’écris.

L’Agitateur : A-t-il été facile de se faire éditer ?

Michel Grosgurin : Oh non ! Si on ne fait pas partie du sérail, si on n’est pas introduit ou si l’on ne connaît pas quelqu’un dans un comité de lecture, on a peu de chance d’être lu… La première sélection des grandes maisons d’édition consiste bien souvent à lire la première et la dernière page d’un bouquin... Dans ce cas, comment avoir sa chance, après tout ce que je viens d’expliquer ?

L’Agitateur : Alors comment avez procédé ?

Michel Grosgurin : J’ai choisi un éditeur à frais partagés. Moyennant une certaine somme connue à l’avance, avec des échéances bien précises, on obtient la publication. L’éditeur se charge également de la diffusion sur internet, du référencement à la bibliothèque nationale et de toutes les formalités… Ce n’est pas le cas lorsque l’on est édité à compte d’auteur. On prend alors tout en charge, ce qui ne laisse guère de temps pour écrire.

L’Agitateur : Quel seront vos prochaines parutions ?

Michel Grosgurin : Je suis actuellement sur l’écriture d’un troisième ouvrage. Ce ne sera pas un recueil de nouvelles car volontairement, je souhaite faire une coupure. Ce sera davantage centré sur ce qu’était mon métier, c’est-à-dire la défense et l’illustration de la langue française. Un pamphlet, dans l’air du temps, autour de la condamnation du manque d’éthique dans la société à tous les niveaux. Un ouvrage à la fois socialement critique, qui essaiera de montrer à quel point notre langue est assaillie par l’Anglais (même si cela n’est pas nouveau) mais qu’elle a des moyens de se défendre... tout cela en restant sur le mode de l’humour. Pour l’instant c’est un objet littéraire non identifié. J’ai également un autre ouvrage en gestation, un mélange plus court constitué de nouvelles, de poèmes, de récits, de contes... Et puis aussi un projet de roman…

Grosgurin Michel, Beurre noir, nouvelles, Editions Amalthée, 2011, 230 pages.


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commentaires
"Il faut prendre mon bouquin de la première à la dernière page." - Etiemble - 31 janvier 2012 à 15:13

Un ouvrage à la fois socialement critique, qui essaiera de montrer à quel point notre langue est assaillie par l’Anglais (même si cela n’est pas nouveau) mais qu’elle a des moyens de se défendre...

D’autant qu’elle est très aidée par l’Education Nationale. Trouvé sur le site du collège Las Cazes, à Montpellier :

L’année dernière la classe de 3eD en partenariat avec FACE HERAULT a créé la graine " LASKEYS "
Grâce à ses porte-clés siffleurs elle a obtenu un bon classement au challenge organisé dans les locaux de l’entreprise DELL de Montpellier
Cette année une nouvelle aventure commence avec la classe de 3eC qui a créé la graine "EASY SHOPPING"
Elle se lance dans la création d’un produit unique au monde le "Porte courses". Alors n’hésitez pas à acheter des actions, c’est bien parti encore une fois et ......
Bravo à nos micro-entrepreneurs en herbe. !

A bientôt. et bon surf..... dans le reste du site.