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MUSIQUE / DISQUE

Coeur de rockers

Les molards, persiste et saigne
lundi 10 septembre 2001 à 20:16, par Charles-Henry Sadien

Non, le "rock alternatif" n’est pas mort. On en parle moins, c’est tout.

Coeur de rockers

"La société est bien foutue : elle donne des uniformes aux connards pour qu’on puisse les reconnaître." Même si le dit mouvement rock alternatif est passé de mode depuis longtemps et semble même moribond depuis la récente disparition de Boucherie Production, de très nombreux groupes se lancent encore dans cette bataille du rock français libre, même si on ne sait plus trop ce que ça veut dire aujourd’hui. C’est le cas du groupe Montpelliérain Les Molards qui n’aurait sans doute pas dépareillé à l’époque ou les Beruriers Noirs, les Garçons Bouchers et autres Wampas occupaient le devant d’une scène foisonnante de talents d’où ont émergés des figures emblématiques comme Manu Chao, François Hadji Lazaro ou Didier Wampas .

A l’écoute de leur premier album Persiste et saigne, on se dit que le groupe arrive près de vingt ans trop tard, époque à laquelle il aurait sans doute eu sa période de gloire. La formule est toujours la même : des riffs à deux doigts, une batterie revêche, une dose d’humour à la française, et un méchante obstination à dénoncer « le système ».

Les Molards ont dû ingurgiter l’intégrale des Shérifs et des Ludwig Von 88 avec des morceaux courts et péchus, entrecoupés de paroles mythiques de films, histoire de faire prendre la mayonnaise. Les Molards intègrent dans leur discours la lutte contre l’expulsion des sans-papiers (Le meilleur des mondes, l’enfermement (Le processus infernal, Etranger) et l’auto-détermination (Dans ta tête, Fais-le toi-même) et les enfants maltraités (Jeune fille en silence). Moins politiquement corrects, ils s’attaquent également au devoir citoyen de vote, qui est un peu une manière pour les hommes politique d’envoyer leurs électeurs aux urnes avec un couteau sous la gorge.

« Tout ça, c’est très gentil, plein de bonnes intentions, et pour tout dire un peu naïf », me direz-vous. Et alors ? A une époque ou le cynisme et la résignation règnent en maîtres, Les Molards remplacent avantageusement la dose quotidienne d’héroïne qui coule dans vos veines qui vous permet de tenir le coup. Et surtout, c’est de là que sont sortis pas mal de bonnes choses que l’on écoute aujourd’hui, sans réaliser toujours d’où ça vient. Lorsque l’on sait que les Ayatollahs du rock (style Inrock ou Télérama) commencent tout juste à reconnaître la portée d’un groupe comme Les Wampas, il n’est sans doute pas mauvais de prendre un peu d’avance et de garder une oreille attentive sur cette scène, certes quasi anonyme - et parfois même décrédibilisée par ceux qui, il y a quelques années la défendaient avec le plus de conviction - mais qui a encore des choses à apporter dans la perspective de l’évolution des musiques actuelles.

Les Molards « Persiste et saigne » - TAF Production.