Élection présidentielle 2012

Sarkozy, un programme et puis s’en va ?

lundi 16 avril 2012 à 14:33, par Mister K

Comme on l’a vu par ailleurs, le bilan du mandat présidentiel de Nicolas Sarkozy est perçu comme plutôt mauvais par la majorité des français et aucun élément tangible ne permet de penser le contraire. Dans ces conditions, on pourrait se demander ce qui motive l’actuel Président de la République pour se présenter de nouveau à l’élection présidentielle en 2012, en dehors bien sûr de l’ambition personnelle. Son entrée tardive en campagne et son programme minimaliste fait penser à une motivation bien plus faible qu’en 2007.
Le programme 2012 de Nicolas Sarkozy se résume en effet à deux choses : 32 mesures plutôt orientées très à droite et une lettre aux français de 34 pages. Sarkozy fait-il un dernier tour électoral pour l’honneur ou bien en fait-il le minimum par arrogance, trop sûr de sa force ?

Sarkozy, un programme et puis s'en va ?

En 2007, la campagne de Nicolas Sarkozy, c’était un rouleau compresseur, rien ne pouvait arrêter l’ambition démesurée de ce petit homme. Tout était pensé dans les moindres détails ou du moins, semblaient l’être. En 2012, c’est un peu le contraire. La campagne de Sarkozy ronronne, semble improvisée, la motivation du petit homme gesticulant n’est plus la même. Alors bien sûr, dans les meetings, les vieux réflexes de 2007 reviennent naturellement. Mais le fond n’est pas le même. On sent que Nicolas Sarkozy, après 5 ans de Présidence de la République est à bout de souffle, un peu comme la France.

Sarkozy fait du surplace en 32 mesures

Ce sentiment est renforcé par son programme fait de 32 mesures, dont pas une ne nous surprend. Alors, on pourrait se dire que 32 mesures, c’est peu...mais en même temps, c’est extrêmement cohérent avec son bilan qui est présenté en 10 points. Sarkozy fait du Sarkozy. Tout est dans la continuité. Il a échoué pendant 5 ans, les français sont mécontents ? Nicolas Sarkozy propose comme première mesure « rendre la parole aux Français, en sollicitant leur avis par référendum quand ce sera nécessaire pour surmonter les blocages ». Les millions de manifestants contre la réforme des retraites seront contents de l’apprendre. Les électeurs qui avaient voté majoritairement non au Traité établissant une Constitution pour l’Europe en 2005 et qui ont récolté le Traité de Lisbonne seront également ravis. Alors, est-ce l’annonce d’un changement de Sarkozy ? Certainement pas. C’est simplement une logique à la Le Pen pour contourner potentiellement toutes les composantes de la République...si le besoin s’en fait sentir. Nul doute que si les deux cas cités précédemment se présentaient, Nicolas Sarkozy se garderait bien de convoquer un référendum...par contre, pour des mesures plus ou moins anticonstitutionnelles et démagogiques, là, on pourrait y avoir droit.
On ne va pas détailler les 32 mesures, mais on peut dire, sans peur de se tromper, que le MEDEF devrait apprécier : allègement des charges patronales (proposition n°4), accords sur le temps de travail (proposition n°5), travail de 7 heures par semaine obligatoire pour les bénéficiaires du RSA (proposition n°7), obligation pour les chômeurs d’accepter un emploi qui correspondra à la qualification qu’ils auront acquise en formation (proposition n°8), exonération des charges patronales pour l’embauche des personnes de plus de 55 ans (proposition n°10). Tout ces cadeaux faits aux entreprises via la diminution des cotisations sociales devant être compatibles avec la mesure numéro trois : revenir à l’équilibre de nos comptes publics dès 2016. Sur qui peuvent peser ces efforts si ce n’est sur les salariés et les plus modestes qui ont l’avantage d’être les plus nombreux ? En filigrane, la casse des services publics risque de s’amplifier. Sarkozy est donc dans la continuité économique, mais aussi dans la continuité en ce qui concerne la récupération des voix et des thèses de l’extrême-droite : réduire de moitié l’immigration (sous entendu, légale...proposition n°22), conditionner le regroupement familial (proposition n°23), exiger de l’Europe un meilleur contrôle de ses frontières (proposition n°24). Au milieu de ces propositions droitistes, quelques mesures qui se veulent sociales comme le proposition n°6 : « augmenter le salaire net des 7 millions de salariés qui gagnent entre 1000 et 1400 euros nets, notamment grâce l’intégration à leur fiche de paie de la prime pour l’emploi ». L’idée serait de réduire les cotisations salariales du montant de la prime pour l’emploi. On ne comprend pas bien le gain pour les salariés mais du côté de Nicolas Sarkozy, on promet une revalorisation net de 840 euros par an...soit 70 euros par mois. Comment ? Mystère...
À la lecture de ces 32 propositions, on a le sentiment qu’aucune de ces mesures ne permettra de résoudre les problèmes de chômage et de pouvoir d’achat. On voit même mal comment il compte réduire le déficit des comptes publics en multipliant les cadeaux aux entreprises.

La lettre au peuple français

À la façon de Mitterrand en 1988, Sarkozy adresse une lettre au français...Cette lettre de 34 pages, il faut la télécharger contrairement à la lettre à tous les français de Mitterrand qui avait été publiée dans les journaux sous forme d’encart publicitaire. Plusieurs millions d’exemplaires de cette lettre auraient été distribués...mais bon, tout le monde n’en a pas vu la couleur. Cette lettre ne dit pas grand chose d’autre que ce à quoi nous a habitué le Président Sarkozy. Le début de la lettre insiste sur la sécurité et l’immigration, sur pas moins de cinq pages, rappelant au passage l’affaire Mérat dès la troisième page. Il en fait moins sur l’école et l’éducation (trois pages), la justice (moins de deux pages) et l’écologie (à peine une page). Cela donne l’état d’esprit. Il fait également la part belle à l’économie et à sa lutte contre la crise et son "sauvetage" de l’euro et de l’Europe. À la fin de sa lettre, on est certain que Sarkozy ne nous promet rien de mieux que ce qu’il a fait entre 2007 et 2012.

Sarkozy est-il cuit ?

On voit mal comment le programme et le ton de Sarkozy pourrait mobiliser la majorité des français derrière lui et changer la donne concernant le rejet que l’actuel Président de la République suscite. Maintenant, il convient d’être prudent et ne pas vendre la peau de l’ours. À une semaine du premier tour, beaucoup, notamment à gauche, pensent que Sarkozy ne pourra être réélu. Mais une élection n’est jamais jouée d’avance. Et un animal politique comme Sarkozy, même si cela semble invraisemblable, peut rebondir. D’ici le 6 Mai 2012, beaucoup de choses peuvent se passer...s’appuyer sur la rationalité pour des élections est peut-être imprudent. Malgré un mauvais bilan, un programme léger et sans souffle et un rejet massif, Nicolas Sarkozy pourrait sauver sa peau...et son dernier petit tour pourrait durer cinq années qui deviendraient alors certainement interminables pour la majorité des français.


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