Vous faites quoi le 7 Juin, vous ?

3 semaines. Dans trois semaines auront lieu les élections européennes. Et chez nous, en France, tout le monde s’en fout [1]. Le taux d’abstention devrait battre tous les records, et pourrait, selon certains sondages, atteindre 65 % (45 % en 2004) ! Deux électeurs sur trois, donc, ne devraient pas se rendre aux urnes. Surprenant quand on sait que près de 80% de la législation française découle du droit européen. Mais à y regarder de plus près, est-ce si surprenant que ça ?

In « concurrence libre et non faussée » we trust

Telle pourrait être la devise inscrite sur les billets en Euro, à l’instar du « in God we trust » inscrit sur les dollars. La « concurrence libre et non faussée » est la religion officielle de l’Europe. Car si l’Europe a toujours été « vendue » par ses initiateurs comme un projet du peuple européen pour le peuple européen, lui promettant de prospérer et de circuler librement dans un vaste territoire protégé et exempt de guerre, la réalité est toute autre.

L’Europe n’est qu’une vaste ZAC (Zone d’Activité Commerciale), régie par les seules lois du marché. S’il est une Europe qui fonctionne bien, c’est celle du libre-échange et de son dieu Euro. Parce que pour les peuples, c’est autre chose. L’Européen français ou allemand est libre d’acheter une voiture fabriquée en Roumanie ou en Tchéquie par des européens sous-payés. Et quand il se retrouve chômeur parce que l’usine où il travaillait, et qui fabriquait des voitures, ferme ses portes (parce que les voitures sont fabriquées ailleurs), il est libre d’aller travailler en Roumanie ou en Tchéquie pour un salaire de misère. L’Europe des marchands, c’est la guerre de tous les Européens contre tous, le nivellement social par le bas (l’Europe autorise une durée de travail maximale de 65 heures par semaine, par exemple).

« Concurrence libre et non faussée » par qui ?

Par la politique, pardi ! Jusqu’à l’avènement de L’Europe, la vie des peuples européens était régie par des Etats démocratiques, dont les représentants étaient élus par le peuple. Ces représentants étaient comptables devant le peuple, et le peuple avait le pouvoir de les virer s’ils faisaient des conneries. On appelait ça trivialement la politique [2]. Et à force de luttes politiques, justement, les peuples avaient imposé des services publics où l’électricité, le billet de train ou l’acheminement du courrier, par exemple, étaient au même prix pour chacun, qu’il habite à Paris ou au fin fond du Berry.

En quelques années, l’Europe libérale a mis à bas ce vaste secteur d’activité sans concurrence [3], avec force « dérégulation » ou « déréglementation » pudiquement appelées « Réforme » et imposée aux Etats membres. Et ce n’est qu’un début. Le gros morceau reste à manger. La santé, les retraites, l’éducation, tous ces secteurs qui n’ont pas vocation à générer du profit, mais uniquement à être au service de la population [4] , vont eux aussi être « réformés » et soumis à la concurrence. Solidarités intra et inter générationnelle seront abolies, les malades paieront (s’ils peuvent) pour se faire soigner, ceux qui n’auront pu organiser leur propre retraite (faute de salaires décents) n’en n’auront pas, et l’enseignement de qualité sera réservés aux seules élites. L’Europe qui se construit n’est rien d’autre que la poursuite de la lutte des classes à l’échelle d’un continent.

L’Etat ne peut pas tout ne peut plus rien

En 2000 Jospin le socialiste déclarait « L’Etat ne peut pas tout » [5] (comprenez c’est le marché qui décide). En 2006, Sarkozy le libéral précise que « l’homme n’est pas une marchandise comme une autre » [6]
(comprenez une marchandise quand même, juste un peu plus difficile à vendre). Au moins, c’est clair.
De fait aujourd’hui, les Etats ne sont plus responsables de rien, et leurs représentants n’ont plus de comptes à rendre. L’Europe a réussi ce tour de force qui consiste à faire que celui qui décide et agit (la Commission européenne non élue), n’est pas celui qui devrait être responsable (l’élu du peuple) [7]. Allez vous plaindre auprès de votre député, et systématiquement il vous répondra : « Mais je n’y peux rien, c’est une décision de l’Europe ! » Et ce même député va faire campagne pour que vous votiez aux Européennes.

Vous faites quoi le 7 Juin, vous ?